Ce que Bastiat dirait au ministre de l'éducation

Laissez les écoles se créer librement. Laissez les parents choisir les écoles qui correspondent à leurs enfants.

5/2/2023

« Détruire la concurrence, disait Bastiat, c’est tuer l’intelligence ».

Bastiat avait bien identifié, déjà à son époque, la cause des maux de l’éducation nationale : le monopole étatique.

« Le plus pressé, ce n’est pas que l’État enseigne, mais qu’il laisse enseigner. Tous les monopoles sont détestables, mais le pire de tous, c’est le monopole de l’enseignement. » (Frédéric Bastiat, Maudit Argent)

Tout monopole a pour effet de perturber l’allocation des ressources. C’est vrai dans le domaine économique mais plus encore dans le domaine scolaire.

En effet, la logique du progrès scientifique implique le pluralisme. L’excellence en matière éducative aussi. L’État n’est pas plus compétent pour décider des critères de la vérité scientifique que pour décider des bonnes méthodes à mettre en place pour l’apprentissage de la lecture ou des mathématiques. L’État n’est pas compétent de manière générale dans le domaine de la pensée, que ce soit dans les sciences dures ou dans les sciences humaines. Chaque fois qu’il veut enseigner des vérités, expliquait Bastiat, il risque de se tromper et donc d’enseigner dogmatiquement des erreurs.

De même, une vérité ne peut être imposée par la loi sans devenir immédiatement un dogme, disait Mill. Elle se transforme en une vérité figée, rendue immobile, incontestable et donc dogmatique. La vérité doit être débattue librement pour apparaître et se développer. Elle ne peut émerger que d’hypothèses librement testées, de la confrontation de points de vue. Pour cela, il faut que l’école dispose d’une autonomie, d’une liberté d’expérimentation et d’innovation pédagogique la plus complète possible.

En 1850, Bastiat avait soumis à l'Assemblée un amendement ayant pour objet la suppression des grades universitaires, en particulier le Baccalauréat. Il écrivait : « Les grades universitaires ont le triple inconvénient d'uniformiser l'enseignement (l'uniformité n'est pas l'unité) et de l'immobiliser après lui avoir imprimé la direction la plus funeste. » Et il concluait : « L'enseignement par le pouvoir, c'est donc l'enseignement par un parti, par une secte momentanément triomphante; c'est l'enseignement au profit d'une idée, d'un système exclusif. » (Baccalauréat et Socialisme)

Les programmes du Baccalauréat, comme ceux des concours du Capes et de l’Agrégation, demeurent situés à l’intérieur d’un paysage intellectuel entièrement stérilisé car entièrement délimité par les bureaucrates qui gouvernent la machine dans les ministères et les syndicats. Il est donc bien clair que la mainmise de l’État nuit au fonctionnement de la science elle-même, à son progrès.

Bastiat précise sa pensée : « Veuillez bien remarquer ceci : quand je m’élève contre les études classiques, je ne demande pas qu’elles soient interdites ; je demande seulement qu’elles ne soient pas imposées. Je n’interpelle pas l’État pour lui dire : Soumettez tout le monde à mon opinion, mais bien : Ne me courbez pas sous l’opinion d’autrui. (…) Messieurs les réglementaires, ce qui vous paraît sublime me semble odieux, ce qui satisfait votre conscience alarme la mienne. Eh bien ! suivez vos inspirations, mais laissez-moi suivre la mienne. Je ne vous force pas, pourquoi me forceriez vous ? » (Baccalauréat et Socialisme)

Bastiat est cohérent. La liberté n’est pas réservée à un domaine et exclue d’un autre. Elle est aussi nécessaire à l’éducation qu’à la presse, à la religion, à l’entreprenariat, à la santé, à la monnaie etc.

« En vérité, j’ai peine à comprendre pourquoi ceux qui demandent l’Éducation Unitaire par l’État, ne réclament pas la Presse Unitaire par l’État. La presse est un enseignement aussi. La presse admet la discussion, puisqu’elle en vit. Il y a donc là aussi diversité, anarchie. Pourquoi pas, dans ces idées, créer un ministère de la publicité et le charger d’inspirer tous les livres et tous les journaux de France ? Ou l’État est infaillible, et alors nous ne saurions mieux faire que de lui soumettre le domaine entier des intelligences ; ou il ne l’est pas, et, en ce cas, il n’est pas plus rationnel de lui livrer l’éducation que la presse. » (Baccalauréat et Socialisme)

Laissez les écoles se créer librement et redonnez de l’autonomie aux proviseurs. Laissez les professeurs libres de leur pédagogie, les écoles libres de leurs programmes et de leur organisation. Laissez les parents choisir les écoles qui correspondent à leurs enfants.

Voilà ce que Bastiat dirait aujourd’hui à notre ministre de l’éducation.